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BIO Web Conf.
Volume 56, 2023
43rd World Congress of Vine and Wine
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Article Number | 03011 | |
Number of page(s) | 12 | |
Section | Economy and Law | |
DOI | https://doi.org/10.1051/bioconf/20235603011 | |
Published online | 24 February 2023 |
Objectifs du Développement Durable (ODD) l'ONU et Responsabilité Sociale/Sociétale des Entreprises, au sein de la filière vitivinicole : concepts et applications
UN Sustainable Development Goals (SDGs) and Corporate Social Responsibility in the wine sector: Concepts and applications
1 Université de Montpellier, Commission Française de Normalisation « Développement Durable-Responsabilité Sociétale » Montpellier, France
2 VitisPlanet, Bouilly, France
* Corresponding author: yann.chabin@umontpellier.fr
† Corresponding author: rochard.joel@gmail.com
En 2015, l’ONU a établi l’Agenda 2030 en fusionnant l’agenda du développement et celui des Sommets de la Terre. Il s’organise autour des « 5P » Planète, Populations, Prospérité, Paix et Partenariats. Les 17 objectifs, déclinés selon 169 cibles plus précises, en forment le cœur et décrivent l’horizon idéal pour 2030 d’un développement durable supposant autant la justice sociale que la croissance économique, la paix et la solidarité que la préservation des écosystèmes. Ces différents aspects ont notamment été appuyés par la mise en place de la Responsabilité Sociale/Sociétale des Entreprises (RSE) et de la norme ISO 26000 :2010 (lignes directrices internationales de la Responsabilité Sociétale des Organisations) dans les différents secteurs d’activité et notamment la vitiviniculture à partir des années 2000.
La communication a pour objectif de présenter les orientations de l’Agenda 2030, les aspects opérationnels d’une démarche RSE au niveau de la viticulture (vignobles, caves, organismes associés) et d’apporter des retours d’expérience, à partir d’une implication des auteurs dans les démarches de plusieurs structures, associée à la réalisation d’audits, l’élaboration de feuilles de route RSE ainsi qu’à la rédaction d’un reporting extra financier et de supports de communication.
Abstract
In 2015, the UN established the 2030 Agenda by merging the development agenda and the Earth Summit agenda. It is organised around the "5Ps" Planet, People, Prosperity, Peace and Partnerships. The 17 goals, broken down into 169 more specific targets, form the core and describe the ideal horizon for 2030 of a sustainable development that implies social justice as much as economic growth, peace and solidarity as much as the preservation of ecosystems. These different aspects have been supported by the implementation of Corporate Social Responsibility (CSR) and the ISO 26000:2010 standard (international guidelines for Organisational Social Responsibility) in the different sectors of activity, and in particular in the wine industry, since the year 2000.
The communication aims to present the orientations of the 2030 agenda, the operational aspects of a CSR approach at the level of winegrowing (vineyards, wineries, associated organizations) and to provide feedback, based on the authors' involvement in the approaches of several structures, associated with the realization of audits, the development of CSR roadmaps as well as the drafting of an extra-financial reporting and communication materials.
© The Authors, published by EDP Sciences, 2023
This is an Open Access article distributed under the terms of the Creative Commons Attribution License 4.0 (http://creativecommons.org/licenses/by/4.0/).
1 Introduction
+ Historique
Le concept de développement durable a été formalisé au cours de la Conférence des Nations Unies sur l'environnement et le développement, connue sous le nom de Sommet "planète Terre" à Rio de Janeiro en 1992. Dans une première phase, y compris pour la viticulture, la notion de développement durable a mis l’accent sur l’impact environnemental de l’Homme, par son activité domestique, agricole ou industrielle et sur le devenir des générations futures. Ainsi, la biodiversité, l’utilisation des énergies fossiles, la production de déchets et les émissions de gaz à effet de serre s’immiscent progressivement dans les itinéraires viticoles (Fig. 1).
Le concept de Responsabilité Sociale des Entreprises ou RSE n’apparaît qu’à partir des années 1950 dans la littérature consacrée aux entreprises (Bowen, 1953). Depuis les années 1980, sous l'impulsion notamment des Organisations Non Gouvernementales, les concepts de finance éthique, de commerce équitable et de développement durable sont entrés dans le débat des instances politiques (Fig. 2). Des recherches sur la RSE se sont concrétisées par la mise au point de référentiels internationaux, de guides de conduite des entreprises comme de normes, certifications et labels validés par des audits ad hoc. C’est dans ce contexte qu’a été élaborée en 2010 la norme internationale ISO 26 000 [1,2].
La RSE, déclinaison des piliers du développement durable à l’échelles de l’organisation, vise en premier lieu les besoins élémentaires des hommes : conditions de travail, nourriture, santé, bien-être, etc. Au-delà, une démarche RSE suppose également une implication de l’entreprise ou de l’organisation vis-à-vis des communautés locales mais également à l’échelle planétaire, en lien notamment avec l’éducation et la culture. Cette vision intègre en particulier la préservation et la valorisation d’un patrimoine commun issu le plus souvent de l’organisation d’une communauté et de la diffusion au cours du temps d’un savoir-faire collectif [3].
Figure 1 Historique de la problématique environnementale depuis la crise phylloxérique jusqu’au développement de la démarche de Responsabilité Sociétale des Entreprises, d’après J. Rochard. |
Figure 2 Emergence progressive de la prise en compte du développement durable. Source : guide RSE PME PMI, www.cgpme-paris-idf.fr. |
+ Objectifs de Développement Durable (ODD) de l’agenda 2030 de l’Organisation des Nations Unies
En 2015, l’Organisation des Nations Unies (ONU) a établi l’Agenda 2030 en fusionnant l’agenda du développement et celui des Sommets de la Terre. L’ONU considère que mettre fin à la pauvreté doit aller de pair avec des stratégies qui développent la croissance économique et répondent à une série de besoins sociaux, notamment l’éducation, la santé, la protection sociale et les possibilités d’emploi, tout en luttant contre le changement climatique et la protection de l’environnement (Fig. 3).
L’agenda 2030 s’organise autour des « 5P » : Planète, Populations, Prospérité, Paix et Partenariats. Les 17 objectifs, déclinés en 169 cibles plus précises, en forment le cœur et décrivent l’horizon idéal pour 2030 d’un développement durable supposant autant la justice sociale que la croissance économique, la paix et la solidarité que la préservation des écosystèmes.
Les 17 objectifs de développement durable pour 2030 (ODD) sont les suivants :
Éliminer la pauvreté sous toutes ses formes et partout dans le monde.
Éliminer la faim, assurer la sécurité alimentaire, améliorer la nutrition et promouvoir l’agriculture durable.
Permettre à tous de vivre en bonne santé et promouvoir le bien-être de tous à tout âge.
Assurer l’accès de tous à une éducation de qualité, sur un pied d’égalité, et promouvoir les possibilités d’apprentissage tout au long de la vie.
Parvenir à l’égalité des sexes et autonomiser toutes les femmes et les filles.
Garantir l’accès de tous à l’eau et à l’assainissement et assurer une gestion durable des ressources en eau.
Garantir l’accès de tous à des services énergétiques fiables, durables et modernes, à un coût abordable.
Promouvoir une croissance économique durable et partagée, l’emploi et le travail décent pour tous.
Bâtir une infrastructure résiliente, promouvoir une industrialisation durable qui profite à tous et encourager l’innovation.
Réduire les inégalités dans les pays et d’un pays à l’autre.
Faire en sorte que les villes et les établissements humains soient ouverts à tous, sûrs, résilients, et durables.
Établir des modes de consommation et de production durables.
Prendre d’urgence des mesures pour lutter contre les changements climatiques et leurs répercussions.
Conserver et exploiter de manière durable les océans, les mers et les ressources marines aux fins du développement durable.
Préserver et restaurer les écosystèmes terrestres, en veillant à les exploiter de façon durable, gérer durablement les forêts, lutter contre la désertification, enrayer et inverser le processus de dégradation des sols et mettre fin à l’appauvrissement de la biodiversité.
Promouvoir l’avènement de sociétés pacifiques et ouvertes à tous aux fins du développement durable, assurer l’accès de tous à la justice et mettre en place, à tous les niveaux, des institutions efficaces, responsables et ouvertes à tous (Fig. 4).
Renforcer les moyens de mettre en œuvre le partenariat mondial pour le développement durable et le revitaliser.
Figure 3 Les 17 objectifs de développement durable pour 2030 (ODD), www.un.org. |
Figure 4 Les 23 principaux critères discriminatoires. |
+ Sphère d’application
Les objectifs de développement durable (ODD) concernent tous les corps économiques et sociaux : États, citoyens, collectivités territoriales, entreprises, ONG. Pour y contribuer, de nombreuses structures intègrent les objectifs de développement durable dans leurs démarches. Au sein des entreprises, les ODD deviennent des repères pour définir et structurer les stratégies RSE et les outils d’évaluation à leur contribution se développent.
La structure peut agir notamment à plusieurs niveaux:
Transformation du fonctionnement interne : une entreprise qui revoit sa politique d’égalité des chances entre les femmes et les hommes contribue à l’atteinte de l’objectif n° 10 «Inégalités réduites».
Innovation des produits ou services : en développant des nouveaux produits moins énergivores ou en misant sur des modes de production limitant les rejets de gaz à effet de serre, les entreprises contribuent à l’ODD n° 12 «Consommation et production durables».
Relation avec les organisations humanitaires. L’entreprise peut ainsi contribuer à l’ODD n°8 lié à un travail décent, en ne collaborant qu’avec des partenaires et fournisseurs respectueux d’exigences de droits humains et la sécurité au travail.
2 Bases de la RSE
+ Définition
Dans ses lignes directrices, l’ISO 26000 donne la définition suivante de la RSE [4] [5] : « responsabilité d’une organisation vis-à-vis des impacts de ses décisions et activités sur la société et sur l’environnement, se traduisant par un comportement éthique et transparent qui contribue au développement durable, y compris à la santé et au bien-être de la société ;
prend en compte les attentes des parties prenantes ;
respecte les lois en vigueur et en accord avec les normes internationales de comportement ;
et qui est intégré dans l’ensemble de l’organisation et mis en œuvre dans ses relations ».
+ Objectifs
J.E. Stieglitz souligne fort justement que [6]. « L'inégalité a un prix, elle est la cause et la conséquence de la faillite du système politique et elle alimente, dans notre système économique, une instabilité et une inefficacité qui l'aggravent à leur tour. C'est ce cercle vicieux qui nous plonge dans l'abîme. (..) Puisqu'il est flagrant que notre système économique ne peut rien pour la plupart des citoyens et que nos gouvernements sont globalement sous la coupe des intérêts privés, la confiance dans la démocratie va s'éroder. Et puisque nous comprenons peu à peu que nombre de nos pays ne sont plus ceux de l'égalité des chances et du fairplay, c'est sans doute notre sentiment de la justice qui est menacé. »
Comme le précise l’Organisation internationale de normalisation (ISO) : « L’engagement d’une organisation pour le bien-être de la société et pour l’environnement est devenu une composante critique de la mesure de ses performances globales et de sa capacité à continuer à fonctionner de manière efficace. Cela reflète, en partie, la reconnaissance croissante de la nécessité de garantir l’équilibre des écosystèmes, l’équité sociale et la bonne gouvernance des organisations. Au final, toutes les activités d’une organisation dépendent de l’état des écosystèmes de la planète. Les organisations sont aujourd’hui soumises à une surveillance plus rigoureuse de leurs diverses parties prenantes. »
Dans sa communication sur la RSE de 2011, la Commission Européenne fixe un cadre pour sa mise en œuvre : « Pour assumer leur responsabilité sociale, il faut au préalable que les entreprises respectent la législation en vigueur et les conventions collectives conclues entre partenaires sociaux. Afin de s’acquitter pleinement de leur responsabilité sociale, il convient que les entreprises aient engagé, en collaboration étroite avec leurs parties prenantes, un processus destiné à intégrer les préoccupations en matière sociale, environnementale, éthique, de droits de l’Homme et des consommateurs dans leurs activités commerciales. »
+ Intérêts de la démarche
Les performances d’une organisation vis-à-vis de responsabilité sociétale peuvent avoir plusieurs intérêts pour une entreprise ou une organisation :
Développement d’avantages concurrentiels ;
Amélioration de la réputation et de l’image ;
Capacité à attirer et à retenir ses salarié(e)s ou ses membres, ses clients ou ses utilisateurs ;
Maintien de la motivation et de l’engagement de ses employés, ainsi que de leur productivité ;
Vision positive des apporteurs de capitaux (investisseurs, propriétaires, donateurs, sponsors et communauté financière dans son ensemble) ;
Relations bienveillantes avec les entreprises, les pouvoirs publics, les médias, les fournisseurs, les pairs, les clients et la communauté au sein de laquelle elle intervient.
+ Norme ISO 26000
La norme ISO 26000 est le fruit d’une collaboration qui s’est échelonnée sur six années. Elle a été élaborée par des centaines d’experts de 90 pays et de 40 organisations internationales représentant les consommateurs, le gouvernement, l’industrie, le milieu du travail, les organisations non gouvernementales (ONG) et le milieu des experts- conseils et de la recherche, de pays développés comme de pays en développement. Il en résulte un texte dense d’une centaine de pages, publié le 1er novembre 2010. Cette norme, qui ne comporte pas d’exigence et, en tant que telle, n’a pas vocation à être associée à une certification. Elle a pour objectif d’aider les organisations à contribuer au développement durable par une déclinaison de ses enjeux au sein des organisations. Elle vise à encourager les organisations à aller au-delà de la loi, en reconnaissant que le respect de la législation est un devoir fondamental pour toute organisation et une part essentielle de sa responsabilité sociétale. La norme vise à promouvoir une compréhension commune dans le domaine de la responsabilité sociétale et à compléter les autres instruments et initiatives de responsabilité sociétale. L’ISO 26000 présente des lignes directrices relatives à la responsabilité sociétale pour tous les types d’organisations, quelle que soit leur taille ou leur localisation, concernant notamment (Figs. 5 et 6).
Les concepts, termes et définitions :
Les origines, les orientations et les caractéristiques;
Les principes et pratiques ;
Les sept questions centrales et les domaines d’action associés ;
L’intégration, la concrétisation et la promotion d’un comportement responsable dans l’ensemble de l’organisation, et à travers ses politiques et pratiques, dans sa sphère d’influence ;
L’identification des parties prenantes et le dialogue avec elles ;
La communication sur les engagements, les performances et autres informations.
Figure 5 Vue d'ensemble de la norme ISO 26000, source www.iso.org. |
Figure 6 Les 7 questions centrales de l’ISO 26000 selon l’entreprise Frayssinet, www.frayssinet.fr. |
+ Parties prenantes
Les parties prenantes (“stakeholders” en anglais) sont définies dans la norme ISO 26000 comme « des organisations ou individus qui ont un ou plusieurs intérêts dans une décision ou activité quelconque d'une organisation » (Figs. 7 et 8). Elles ont différents types d'interactions avec une organisation en:
Contribuant directement aux activités de l'organisation (dirigeants, collaborateurs, fournisseurs, clients) ;
Observant ou en influençant son comportement (syndicats, ONG) ;
Etant affectées, directement ou indirectement, positivement ou négativement, par les activités de l'organisation (riverains, collectivités territoriales, l'Etat…) ;
Il existe deux types de parties prenantes dans l'organisation :
Internes : dirigeant, collaborateurs, actionnaires, syndicats…
Externes : clients, fournisseurs, communauté locales, ONG…
L'un des objectifs de la RSE est d’établir un dialogue avec les parties prenantes pertinentes de l'organisation. Il s’agit aussi de prendre conscience de la multitude de parties prenantes afin d’identifier les risques et les opportunités qui leur sont liés. Ainsi pour développer une démarche de RSE au sein d’une entreprise, il est essentiel que toutes ses parties prenantes internes et externes soient clairement identifiées et que les intérêts des parties prenantes prioritaires soient compris. Parmi les parties prenantes, on retrouve notamment :
Figure 7 Exemples de parties prenantes d’une exploitation vitivinicole (liste non limitative). |
Figure 8 Exemple de parties prenantes, www.loire-proprietes.com. |
- Le directeur général et les instances dirigeantes
En tant que décideur, le directeur général est le premier responsable de la stratégie RSE, il doit fixer une vision et définir des moyens pour l’atteindre. Les comités et organes de décisions stratégiques (conseil d’administration, gérants, directeurs généraux, etc.) ont également un rôle clé dans l’accompagnement des équipes dirigeantes opérationnelles, notamment sur les sujets de gouvernance, transparence, respect des standards internationaux etc.
- Les actionnaires
Ils attendent un retour sur investissement financier. Cependant, certains fonds d’investissement dits « d’investissement socialement responsable », visent également des comportements vertueux de la part des entreprises sur les plans environnementaux et sociaux, stratégie de nature à limiter les risques pour l’entreprise.
- Les salariés et leurs organes de représentation
Capital humain de l’entreprise, ils sont à la fois force de production, d’innovation mais aussi premiers ambassadeurs des valeurs et des politiques RSE de leur entreprise. D'un côté, les collaborateurs sont à la fois concernés et affectés par la démarche RSE et de l'autre, ils peuvent choisir de prendre part à sa mise en œuvre et d'intégrer la RSE au quotidien dans leurs métiers. Les aspects de la RSE qui concernent les collaborateurs sont nombreux : Gouvernance, dialogue social, qualité de vie au travail, lutte contre les discriminations, équité, sécurité au travail, etc.
- Les fournisseurs
Dans le cadre d’une démarche RSE, entretenir une relation de confiance et durable avec ses fournisseurs est indispensable. A travers sa politique d’achats responsables, l’entreprise peut inciter ses fournisseurs à développer un engagement RSE et un comportement plus transparent et éthique.
- Les clients
Les attentes des différents clients doivent être prises en compte (consommateurs, entreprises, organisations ou collectivités). Il est important d’avoir l’esprit que de plus en plus de consommateurs souhaitent acheter des produits de qualité, équitables et respectueux de l’environnement. Parallèlement, certains d’entre eux choisissent de boycotter des entreprises s’ils considèrent que les services ou biens qu'elles proposent ne sont pas éthiques et écoresponsables.
- Les communautés locales
Les communautés locales partagent leur territoire avec l’organisation. Le dialogue avec les communautés est indispensable pour prévenir les potentiels conflits et risques causés par l’organisation.
- Les pouvoirs publics
Les pouvoirs publics sont des parties prenantes sur plusieurs aspects : ils mettent en place des réglementations, sont également des acteurs économiques dans l’entreprise, par le biais d’appels d’offre, de l’actionnariat ou des achats.
- Les ONG
Les Organisations Non Gouvernementales interpellent et/ou collaborent avec les entreprises afin de faire évoluer les pratiques de RSE. Lanceurs d’alertes, elles inspirent les régulateurs et peuvent contribuer à créer de nouvelles contraintes pour les entreprises. Une entreprise responsable peut également s'engager auprès du monde associatif et des ONG à travers du mécénat, par exemple.
3 Exemples d’outils à l’appui de la démarche RSE
En France, le secteur vitivinicole, à travers quelques organisations collectives et entreprises pionnières, a très tôt investi les questions de RSE, initiant notamment un accord national porté par l’Association Française de Normalisation (Afnor), dont l’issue été la publication d’un guide d’intégration de l’ISO 26000 pour les entreprises du vin. A l’aune de nos différentes expériences d’accompagnement d’entreprises et d’organisations interprofessionnelles, de l’analyse de la littérature académique, nous pouvons tirer quelques enseignements sur l’intérêt des démarches RSE, les méthodes à mettre en œuvre, les outils à mobiliser, l’identification des enjeux RSE (de sa responsabilité sociétale) et les parties prenantes avec lesquelles dialoguer pour y répondre.
+ Matrice de matérialité
La matrice de matérialité propose une représentation des enjeux RSE de l’entreprise qui permet de les prioriser. Les enjeux « matériels » comprennent les enjeux qui ont un impact direct ou indirect sur une organisation et sont en capacité de créer, préserver ou détruire sa valeur économique, environnementale ou sociale, celle de ses parties prenantes ou de la société dans son ensemble. Ainsi, ces enjeux reflètent les impacts significatifs d’une organisation en matière de développement durable et influencent substantiellement les évaluations et décisions de ses parties prenantes.
La nature des enjeux RSE retenus dépendra ainsi des enjeux de la société dans son ensemble, du secteur d’activité de l’entreprise mais également des enjeux en lien avec les caractéristiques du territoire de l’entreprise. Les enjeux préalablement identifiés, une matrice de matérialité consiste à les hiérarchiser selon deux dimensions. L’une représente l’importance (la matérialité) de l’enjeu du point de vue de l’entreprise, en particulier de sa gouvernance.
L’autre positionne les enjeux leur intérêt du point de vue des parties prenantes. L’analyse de la presse sectorielle, de rapports tels que ceux d’ONG, de dires d’experts ou encore de la littérature scientifique permet d’appuyer la qualité de l’analyse de matérialité produite. A cette étape de la construction de la démarche RSE, le choix des parties prenantes à interroger, afin de recueillir leur évaluation des enjeux retenus, est primordial.
Dans le cas de l’entreprise Peris, labelisé RSE en 2020, leader dans le sud de la France domaine de l’agro distribution de produits de biocontrôle, les enjeux RSE ont été identifiés sur la base du recueil des différentes sources d’informations primaires et secondaires suivantes :
Etudes récentes pour les filières agricoles ;
Matrice Forces faiblesses Opportunités Menaces réalisée par un collectif d’agro distributeurs (Agrosud) ;
Dires d’experts (filières agricoles et experts RSE E) ;
Réunions internes avec le Comité de Direction du groupe Peris ;
Entretiens avec des parties prenantes prioritaires (clients, agrofournitures, banques, etc.) ;
Enquête auprès des salariés ;
Enquête RSE réalisée par la Fédération Nationale du Négoce Agricole ;
Etude marketing/consommateurs ;
Analyse des démarches RSE d’entreprises du secteur de l’agro distribution (Coops d’approvisionnements et rapports RSE associés) ;
Analyse de matérialité dans les rapports DD/RSE et les Déclarations de Performances Extra- Financières d’Entreprises du secteur agricole ;
Analyse des travaux académiques filière vin (France et international) ;
Revue de presse généraliste et professionnelle (bases Europresse) ;
Exemples de cas étudiés de leaders RSE vitivinicoles.
L’exemple d’analyse de matérialité produite par la société Laffort®, leader dans le domaine de l’œnologie, révèle ainsi le niveau de priorité attribué à chacun des enjeux retenus dans le cadre de la stratégie RSE (Fig. 9).
Figure 9 Matrice de matérialité de l’entreprise Laffort® France. |
+ Cartographie des parties prenantes
La hiérarchisation des parties prenantes repose sur un classement préalable. Certains travaux de normalisation proposent deux axes : l’un positionne la partie prenante selon le niveau d’importance pour l’entreprise, l’autre selon le niveau de relation, de dialogue entretenu avec l’entreprise (Figs. 10 et 11). Le classement est réalisé sur la base d’une échelle d’évaluation de 1 à 5 points (Afnor X30- 029). L’exercice de cartographie des parties prenantes permet, à terme, d’établir un plan de dialogue en particulier avec celles identifiées comme prioritaires.
Les interviews, conduites dans le cadre de l’analyse de matérialité, peuvent par ailleurs être l’occasion d’un recueil des attentes des parties prenantes prioritaires, en matière par exemple de relations clients-fournisseurs, de consommation durable, d’innovations responsables, de développement de produits écoresponsables ou de pratiques éthiques, mises en place par les parties (code de conduite, chartes, certifications, etc.).
En complément, l’analyse permet également d’identifier de nouvelles parties prenantes à même de soutenir, dans le cadre de relations de partenariat (Fig. 11), les projets de l’entreprise en matière par exemple de R&D, de biodiversité, d’écoconception des produits et des processus, d’économie circulaire, d’amélioration de la qualité de vie au travail, voire d’investissement dans la vise du territoire d’appartenance (soutiens aux associations, à l’installation de jeunes viticulteurs, adhésion à un collectif de viticulture durable, mécénat, etc.).
Figure 10 Cartographie des parties prenantes (document Afnor X30-029). |
Figure 11 Parties prenantes de la démarche RSE Laffort®, www.laffort.com. |
+ Rapport RSE
Selon la taille de l’entreprise, ce rapport peut éventuellement répondre à une obligation réglementaire. En France, il prend alors la forme d’une Déclaration de Performances Extra- Financières (DPEF). Un rapport RSE (rapport de responsabilité sociale d’entreprise, ou déclaration de performance extra-financière) est un document réglementaire périodique (généralement annuel) publié par une entreprise pour rendre compte de ses actions et de ses résultats en matière de responsabilité sociale d’entreprise. Il synthétise et rend publiques toutes les informations sur les actions mises en place par l’entreprise pour respecter les principes du développement durable. Les informations soumises à obligation de publication sont de trois ordres :
Informations sociales : elles concernent l’emploi dans l’entreprise, les modalités d’organisation du travail, la sécurité, la santé, la formation, le dialogue social.
Informations sociétales : elles se rapportent à l’égalité du traitement hommes/femmes, à l’insertion des travailleurs handicapés, aux mesures anti- discrimination, à l’impact sur le développement et l’emploi local, mais aussi aux relations avec les parties prenantes (fournisseurs, sous-traitants…) et aux actions visant la santé et la sécurité des consommateurs.
Informations environnementales : toutes actions de développement durable relatives à la préservation des ressources et de la biodiversité, à la lutte contre la pollution et le réchauffement climatique, à l’économie circulaire… conformément au processus de la transition énergétique.
Les exigences croissantes de transparence, traduite en particulier par la publication annuelle de rapports de développement durable / RSE, sont apparus dans les années 1980. Le travail historique de la Global Reporting Initiative (GRI), reprise notamment par l’ISO 26000, est à ce titre marquant. Il oriente les méthodes de reporting et propose une batterie d’indicateurs relativement complète. Nous pouvons également noter le programme COP (Communication On Progress) porté par le Global Compact des Nations Unies en lien avec les ODD (www.unglobalcompact.org/participation/report/cop).
Dans le domaine vitivinicole, certains pays comme le Chili se sont illustrés par une dynamique collective sectorielle de publication d’information extra financières sur la base de la GRI. L’attractivité des investissements dans le domaine viticole a renforcé cette dynamique pour répondre en particulier aux investisseurs boursiers et institutionnels. A ce titre, nous observons une orientation des publications intégrant fortement les enjeux climatiques telle que l’illustre l’intérêt porté par certaines entreprises situées dans des pays à potentiel de développement viticole certain. Pour répondre aux attentes des investisseurs, les rapports RSE s’appuient de plus en plus sur des référentiels internationaux reconnus tels que ceux produits par la task force on Climate-Related Financial Disclosures (TCFD).
En France, les grandes entreprises ont une obligation de fournir un « reporting extra financier » annuel, appelé initialement « reporting RSE ». Cette obligation s’applique :
Pour une société cotée : effectif supérieur à 500 employés, bilan supérieur à 20 millions d’euros ou chiffre d’affaires excédant 40 millions d’euros.
Pour une société non cotée : effectif également supérieur à 500 employés, mais bilan ou chiffre d’affaires excédant 100 millions d’euros.
Les établissements exerçant une activité de crédit, assurance, mutuelle, prévoyance sont soumis à l’obligation de déclaration, selon leur forme juridique et conformément aux seuils définis.
4 Application au secteur viti-vinicole
Comme le précise S. Favre : « La RSE s’inscrit totalement dans l’image qu’ont les consommateurs de la filière : un monde animé par le respect du terroir, faisant vivre les campagnes, proposant des produits sains et authentiques. Tous ces mots sont présents sur la plupart des contre-étiquettes des vins français. Au-delà des mots, les entreprises engagées dans des démarches RSE/ISO 26000 souhaitent prouver leur engagement. (…). La RSE va devenir un enjeu de filière viticole. Le marché international et interne le demande, les consommateurs le souhaitent et la concurrence l’a compris ».
En France, en 2013, sous l’impulsion de l’interprofession de l’IGP Pays d’Oc, une quarantaine d’entreprises et d’organismes se sont mobilisés pour rédiger un guide de lecture de la norme ISO 26000, adapté à la filière vin. Coordonné par Y. Chabin et l’Afnor normalisation, le guide est devenu un support de référence. Il reprend les 7 questions centrales de l’ISO 26000 et précise, pour chacune d’elles, les enjeux pour la filière, les champs ouverts par les domaines d’action de ces questions et les enrichit d’aspects spécifiques, tels que l’œnotourisme éco-responsable (Fig. 12) [7,8].
UN GUIDE AFNOR A LA DISPOSITION DES ACTEURS VITICOLES
Figure 13 Guides ISO 26 000 de la filière vin, www.boutique.afnor.org. |
Le guide AC X30-032 résulte de l’engagement collectif d’une quarantaine de représentants d’entreprises vitivinicoles françaises, d’interprofessions, de fédérations et syndicats professionnels, d’institutions, d’établissements d’enseignement et de recherche notamment (Fig. 13). Il a été validé par une étape de consultation auprès d’une centaine d’acteurs de la filière. Il vise à dépasser les initiatives unilatérales et à aller au-delà des enjeux de qualité et d’origine géographique. Il dresse une liste de recommandations pour les entreprises souhaitant initier ou améliorer leur stratégie et leurs actions en matière de RSE. Il concrétise les enjeux de la responsabilité sociétale pour la filière vin en s’appuyant sur le document le plus légitime sur ce sujet : la norme internationale ISO 26000 ainsi que les documents et les retours d’expérience associés.
Des préconisations concrètes et opérationnelles sont proposées pour intégrer la RSE dans le projet d’entreprise. Sur le volet social par exemple, les enjeux des conditions de travail sont traités précisément pour favoriser le développement du capital humain. Pour ceux de la sous-traitance, les propositions ont pour objectif d’avoir des pratiques loyales et respectueuses. Sur le volet environnemental, tous les professionnels engagés ont notamment défini des repères pour prévenir les pollutions, utiliser les ressources durablement et maintenir la biodiversité. Le lien est aussi fait avec la protection et l’information du consommateur sur les produits et les métiers de la filière. Des méthodologies précises sont aussi proposées pour identifier et hiérarchiser les parties prenantes et définir un plan d’actions.
Figure 12 Les 7 questions centrales de la norme ISO 26000 illustrées pour la filière vin, www.afnor.org. |
5 Quelques exemples
+ Structures de production de vin
- Vignerons de Buzet
La cave coopérative, qui représente l'essentiel de l'appellation éponyme s’est engagée depuis 2005 dans la voie de la responsabilité sociétale et environnementale (RSE). Elle vise notamment une transition écologique, avec comme finalité, la suppression de tout intrant chimique de synthèse, la préservation de sols vivants, et un impact positif sur notre territoire, qu’il soit environnemental, économique comme social. (Fig. 14). En partant du constat que les consommateurs sont de plus en plus informés et responsables, elle élabore et met en valeur un Vin respectueux de l’Homme et de la Nature, tout en se donnant les moyens d’agir de façon éthique et pérenne, du pied de vigne au plaisir de la dégustation [9].
Figure 14 Les vignerons de Buzet associent dans le cas de la démarche RSE une gestion optimale de l’eau, ainsi que des effluents, traités par un dispositif écologique. |
- Maison Castel
Cette structure qui cultive environ 1400 hectares de vignobles en France (Bordelais, Côtes de Provence, Muscadet et Languedoc), avec également une activité de négoce et de cavistes distributeurs, s’est engagée en faveur d’une viticulture durable et écoresponsable pour l’ensemble de ses structures de production avec le label Terra Vitis ainsi que vers la production biologique pour une partie du vignoble (Fig. 15).
Figure 15 Stratégie globale durable de la maison Castel, www.vins-castel.wine. |
- Caves de Rauzan
Issue d’une dynamique de 3 structures créées dans les années 1930, la structure qui rassemble 320 vignerons et plus de 4000 hectares, est certifiée ISO 9001 et 14001 depuis 1998. En 2009, l’entreprise est engagée dans une démarche volontaire de Développement Durable avec une approche « Engagé RSE » validée en 2017 (Fig. 16).
Figure 16 Évolution des démarches environnementales au sein de la structure des « Caves de Rauzan », depuis la création de la station d’épuration, www.cavederauzan.com. |
- Cave de Tain
La coopérative offre une diversité d’implantation dans le vignoble, sur la rive gauche du Rhône. Engagée depuis 2007 dans le collectif Vignerons en Développement Durable, la structure bénéficie depuis 2019 du label Vignerons Engagés, qui intègre pleinement la RSE dans sa vision durable (Fig. 17).
Figure 17 Volet environnement de la démarche de la cave de Tain, www.cavedetain.com. |
- Domaine Tariquet
Le Domaine Tariquet couvre quelques 1200 hectares de vigne et à ce titre est l’une des plus importantes exploitations indépendantes d’Europe. Labelisé Engagé RSE à u niveau confirmé en 2021 et engagée dans une démarche de viticulture raisonnée depuis plus de 25 ans, l’ensemble de l’exploitation est certifié Haute Valeur Environnementale et l’entreprise est certifiée ISO 14001. En 2022, une évaluation des émissions de gaz à effet de serre a été réalisée et un programme ambitieux a été engagé en matière d’analyse et de préservation de la biodiversité (Fig. 18).
Figure 18 Valeurs et Charte RSE du Domaine Tariquet, www.tariquet.com. |
- Cave des Vignerons Landais Tursan-Chalosse
La cave, située dans le sud-ouest de la France, regroupe 92 vignerons qui cultivent 500 Ha de vignes, AOP Tursan et IGP Landes. En 2018, une étude approfondie a été menée pour définir les besoins et attentes des parties prenantes et une communication régulière auprès d'eux été mise en place (Fig. 19). Des partenariats ont été développés avec des associations sportives, culturelles, des organismes privés, des collectivités, des médias, des écoles, pour être au plus près des consommateurs et participer à la dynamique territoriale.
Figure 19 Afin de formaliser les engagements réciproques entre les salariés et la direction, une Charte Ethique et Sociale a été rédigée avec plusieurs axes opérationnels, www.tursan.fr. |
+ Fournisseurs de la filière vigne et vin
6 Société Laffort®
Créé en 1895 à Bordeaux, l’entreprise s’est développée au fil des années en France et à l’international. Le développement durable, y compris sous l'angle de l'engagement social et sociétal a été intégré dans les orientations stratégiques et la Recherche-Développement, avec la volonté d'associer l’ensemble des parties prenantes dans la démarche RSE. Dans le cadre du projet RSE de Laffort®, 11 enjeux prioritaires sont issus de l’analyse de matérialité. Cinq de ces enjeux, ont été mis en avant dans le premier rapport RSE comme engagements fortement soutenus par la société (Fig. 20).
Figure 20 Exemple d’enjeux RSE prioritaires de la société Laffort® (www.laffort.com). |
7 Frayssinet
La société spécialisée dans la fertilisation organique des sols et de la stimulation naturelle des plantes, a intégré les parties prenantes dans le business modèle, à partir de la méthode AFNOR XP X 30-029, afin d’améliorer et d’ajuster les actions dans le plan de progrès. La démarche a été réévaluée en juillet 2021; le bilan global de ses pratiques et de ses résultats a conclu à une progression, confortant la démarche au niveau « Exemplaire » et positionnant l’entreprise comme l’une des plus engagée à l’échelle nationale (Fig. 21).
Figure 21 Stratégie liée au développement durable et à la RSE de Frayssinet, www.groupe-frayssinet.fr. |
8 Conclusion
De notre expérience d’accompagnement des démarches RSE d’entreprises de la filière vin (agro- fournisseurs, agro-distributeurs, producteurs de vin de petite et de grande taille, collectif de producteurs réunis autour du respect d’un cahier des charges de pratiques durables à la vigne et en cave …), nous proposons quelques recommandations pour une construction pertinente de la démarche RSE des engagements pris et des résultats obtenus (Fig. 22) :
- +
Positionner la démarche RSE à l’échelle stratégique. Cela implique de mobiliser la gouvernance de l’entreprise, quelle que soit la taille de cette dernière, en créant un comité de pilotage, avec les principales responsabilité fonctionnelle (qualité, logistique, achats, finance, commerce et marketing…). Dans le cas d’exploitations de petite taille, de gouvernance souvent familiale, l’association de salariés aux réflexions et décisions est recommandée.
Les engagements RSE ne trouveront leur intérêt qu’en considération de leur intégration aux orientations stratégiques de l’entreprise et à ses marchés (type de clientèle, modes de distribution…). En effet cette démarche contribue à la création de valeur par une valorisation du capital immatériel (réputation, cohésion interne, qualité de la relation avec les parties prenantes …) et une transition vers des processus plus écoresponsables (diminution des consommations de ressources, stimulation d’innovations éco responsable, etc.);
- +
N’engager la construction d’une feuille de route de RSE qu’après s’être assuré de la formalisation des valeurs de l’entreprise, de la mission et de la vision qui lui sont associées.
- +
Prendre appui sur les référentiels et guides internationaux pour définir la nature et le périmètre des engagements RSE, des actions à mettre en œuvre, des indicateurs à piloter. A ce titre, les Objectifs de Développement Durable de l’ONU constituent un réel intérêt pour la réflexion interne des contributions auxquelles l’entreprise peut s’attacher. Ils présentent un cadre intéressant et stimulant de mobilisation des équipes pour définir et prioriser les engagements de Développement Durable. La norme ISO 26000, les 7 questions centrales et domaines d’action associés permettront en complément de construire une feuille de route RSE portée par une vision holistique. Ses lignes directrices garantissent une RSE « sans trou dans la raquette ». Il importera également de se référer à la résolution 641-2020 de l’OIV « guide pour la mise en œuvre des principes de la vitiviniculture durable », fruit d’un travail international.
- +
Construire une feuille de route RSE intégrant des engagements d’ordre social, économique, environnemental et sociétal, portés par le principe du PDCA (Planification, Déploiement, Contrôle et Amélioration). Cela implique de définir un calendrier pour chaque engagement, préalablement hiérarchisé, avec des indicateurs de suivi des moyens mobilisés et de résultats ciblés. L’objectif d’une éventuelle certification de la démarche RSE opérée par un organisme indépendant renforcera le respect des délais de d’obtention des améliorations et changements et confortera l’atteinte des objectifs d’indicateurs RSE dans leur ensemble. L’évaluation externe de la démarche représente par ailleurs un réel facteur de motivation des équipes.
- +
Mobiliser les outils fondamentaux de toute démarche RSE : analyse d’enjeux et cartographie des parties prenantes. Une adaptation à la taille de l’entreprise s’avère nécessaire. D’expérience, une analyse de matérialité conduit à analyser de trente à une centaine d’enjeux. La cartographie des parties prenantes et le dialogue engagé avec certaines d’entre elles (par l’entreprise ou par un tiers) s’avère par ailleurs utile à la compréhension de leurs besoins et aux perspectives de collaborations à engager.
- +
Ne pas négliger les outils d’animation, de partage des informations et de communication à destination des parties prenantes internes comme externes. La démarche RSE est source de décloisonnement, de dialogue et de transversalité au profit de décisions plus pertinentes et construites sur un mode participatif.
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Appuyer la démarche RSE par des pratiques culturales vertueuses (éco-socio-responsables) ou une politique d’achats responsables de raisin et de vin dans le cadre d’une activité de négoce. Il s’avère alors important de veiller à la nature et au sérieux des certifications « de durabilité » mises en œuvre, en particulier pour le périmètre couvert par les cahiers des charges (présence d’exigences sur le plan social), ainsi qu’aux impératifs de qualité et de traçabilité [10].
- +
Rendre compte des engagements et des réalisations. Une démarche RSE n’a de valeur qu’à travers la communication qui lui est associée. Elle se distance des communications traditionnelles du secteur viti-vinicole, qui par nature sont centrées sur le produit. Cette démarche agit comme un levier sur la réputation et l’image de l’entreprise plus qu’elle n’appuie l’attractivité du produit vin. Le label d’engagement durable sur le conditionnement ou la création de packagings écoresponsables (bouteille de verre allégée, conditionnement en PET organique recyclable…) vient néanmoins parfois témoigner des engagements de l’entreprise. Le rapport RSE ou de développent durable, qu’il soit produit de façon volontaire ou soumis aux exigences réglementaires (variables selon le pays d’origine) reste un document précieux par sa capacité à répondre au besoin d’information des parties prenantes dans leur ensemble et à convaincre de la probité des engagements comme de la capacité de résilience de l’entreprise [11].
Figure 22 Principales étapes d'une démarche RSE www.hr-path.com. |
References
- Responsabilité sociétale des entreprises (RSE) Revue VITI hors-série, numéro 29, décembre (2018) https://www.mon-viti.com/filinfo/developpement-durable-rse/hors-serie-sur-la-rse-consulter-gratuitement [Google Scholar]
- H. R. Bowen, Social Responsibilities of the Businessman. Editions Harper, New York (1953). [Google Scholar]
- J. Rochard, Contribution des savoir-faire viticoles au développement durable et à la démarche de Responsabilité Sociétale et Environnementale, dans le cadre d’une gouvernance patrimoniale des terroirs 40th World Congress of Vine and Wine (2017) www.bio-conferences.org/articles/bioconf/pdf/2017/02/bioconf-oiv2017_04013.pdf [Google Scholar]
- Découvrir ISO 26000, plaquette ISO (Organisation internationale de normalisation), www.iso.org/files/live/sites/isoorg/files/store/fr/PUB100258_fr.pdf [Google Scholar]
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- J. E. Stiglitz, le prix de l'inégalité, éditions Acte sud (2014) [Google Scholar]
- J. Rochard, Principe et application de l’éco- œnotourisme, 43e congrès de l’OIV Mexico, 2022, www.bio-conferences.org (à paraître) [Google Scholar]
- J. Rochard, Traité de viticulture et d’œnologie durable, Editions avenir œnologie (2005). http://store.oeno.tm.fr/libfr/viticulture/traitevitic-rochard.html [Google Scholar]
- J. Rochard, R. Wang, A. Alary, A. Y. Lecuona, Y. P. Philippe., Ingénierie écologique appliquée aux effluents vinicoles : exemple du dispositif de BlueSET phytostation® dans la cave « Les Vignerons de Buzet ». 41ème Congrès Mondial de la Vigne et du Vin (2018) https://www.bio-conferences.org/articles/bioconf/full_html/2019/01/bioconf-oiv2018_02002/bioconf-oiv2018_02002.html [Google Scholar]
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- S. L. Golicic, D. J. Flint, Paola Signori, Building business sustainability through resilience in the wine industry, International Journal of Wine Business Research (2017) [Google Scholar]
Todas las figuras
Figure 1 Historique de la problématique environnementale depuis la crise phylloxérique jusqu’au développement de la démarche de Responsabilité Sociétale des Entreprises, d’après J. Rochard. |
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Figure 2 Emergence progressive de la prise en compte du développement durable. Source : guide RSE PME PMI, www.cgpme-paris-idf.fr. |
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Figure 3 Les 17 objectifs de développement durable pour 2030 (ODD), www.un.org. |
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Figure 4 Les 23 principaux critères discriminatoires. |
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Figure 5 Vue d'ensemble de la norme ISO 26000, source www.iso.org. |
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Figure 6 Les 7 questions centrales de l’ISO 26000 selon l’entreprise Frayssinet, www.frayssinet.fr. |
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Figure 7 Exemples de parties prenantes d’une exploitation vitivinicole (liste non limitative). |
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Figure 8 Exemple de parties prenantes, www.loire-proprietes.com. |
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Figure 9 Matrice de matérialité de l’entreprise Laffort® France. |
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Figure 10 Cartographie des parties prenantes (document Afnor X30-029). |
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Figure 11 Parties prenantes de la démarche RSE Laffort®, www.laffort.com. |
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Figure 12 Les 7 questions centrales de la norme ISO 26000 illustrées pour la filière vin, www.afnor.org. |
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Figure 13 Guides ISO 26 000 de la filière vin, www.boutique.afnor.org. |
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Figure 14 Les vignerons de Buzet associent dans le cas de la démarche RSE une gestion optimale de l’eau, ainsi que des effluents, traités par un dispositif écologique. |
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Figure 15 Stratégie globale durable de la maison Castel, www.vins-castel.wine. |
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Figure 16 Évolution des démarches environnementales au sein de la structure des « Caves de Rauzan », depuis la création de la station d’épuration, www.cavederauzan.com. |
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Figure 17 Volet environnement de la démarche de la cave de Tain, www.cavedetain.com. |
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Figure 18 Valeurs et Charte RSE du Domaine Tariquet, www.tariquet.com. |
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Figure 19 Afin de formaliser les engagements réciproques entre les salariés et la direction, une Charte Ethique et Sociale a été rédigée avec plusieurs axes opérationnels, www.tursan.fr. |
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Figure 20 Exemple d’enjeux RSE prioritaires de la société Laffort® (www.laffort.com). |
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Figure 21 Stratégie liée au développement durable et à la RSE de Frayssinet, www.groupe-frayssinet.fr. |
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Figure 22 Principales étapes d'une démarche RSE www.hr-path.com. |
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